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HENRI OUELLETTE-VÉZINA LA PRESSE
Le centre de services scolaire de Montréal (CSSDM) menace de poursuivre plusieurs organismes communautaires qui refusent d’acquitter leur loyer en guise de protestation contre le manque de financement gouvernemental. La situation fait craindre le pire dans le milieu, qui devra réduire l’aide aux citoyens.
« Nous vous demandons de payer dans les dix jours de votre réception de la présente. À défaut d’obtempérer […], le CSSDM se réserve le droit d’entreprendre tous les recours en vertu du bail et de la loi, notamment d’instituer les procédures judiciaires qui s’imposent », écrit la coordonnatrice à la planification et au développement immobilier du CSSDM, Claude Laurin, dans une mise en demeure obtenue par La Presse.
Le document a été envoyé vendredi dernier à au moins quatre organismes : le Comité social du Centre-Sud, les Ateliers du Plateau, le Comité d’éducation aux adultes et le Carrefour d’éducation populaire de Pointe-Saint-Charles. Chacun de ces groupes doit un loyer substantiel au CSSDM, pour un total combiné de 199 928 $.
C’est que la plupart de ces organismes font depuis quelques mois une « grève du loyer » afin d’accentuer la pression sur Québec pour obtenir une enveloppe de financement récurrent qui leur permettrait de rester dans leurs locaux à long terme.
« Nous n’avons toujours pas reçu le financement promis par le [ministère de l’Éducation] pour honorer le loyer et nous ne pouvons pas payer le CSSDM. Le ministre et le CSSDM sont au courant qu’il s’agit d’une embûche », déplore Xavier Philippe-Beauchamp, porte-parole du collectif InterCEP, qui regroupe plusieurs centres d’éducation populaire à Montréal.
L’éducation populaire « en danger »
Selon M. Philippe-Beauchamp, la mise en demeure du CSSDM a été envoyée au lendemain d’une rencontre avec le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, durant laquelle « aucune solution n’a été dégagée ».
« Il n’y a rien qui est proposé. Et pendant ce temps, pour 200 000 $, ils sont en train de mettre en danger l’éducation populaire à Montréal », déplore-t-il, craignant que des groupes doivent « piger dans leurs ressources déjà fragilisées » pour payer le CSSDM si Québec n’intervient pas.
On ne comprend pas que ça ne soit pas possible d’avoir une vision à long terme. Ce qu’on demande, c’est une subvention d’environ 1,1 million par année, alors que le Ministère a un budget de 2 milliards.
Xavier Philippe-Beauchamp, porte-parole d’InterCEP
En août, La Presse révélait l’existence d’un mémoire de la Ville de Montréal selon lequel une cinquantaine d’avis d’éviction ont été envoyés à des organismes communautaires dans la dernière année. Ces avis ciblent 13 bâtiments scolaires appartenant au CSSDM.
« Fermer, ça voudrait dire qu’environ 300 familles n’auront plus de soutien alimentaire. […] Ça serait une catastrophe », s’était inquiétée la directrice du Pavillon d’éducation communautaire Hochelaga-Maisonneuve, Martha Ortiz, dont le groupe est visé par un avis d’éviction.
Dès novembre 2022, le CSSDM avait fait savoir qu’il ne souhaitait plus gérer d’immeubles qu’il n’utilise pas pour les écoles.
« Poursuivre notre travail »
Par écrit, la ministre responsable de la Solidarité sociale et de l’Action communautaire, Chantal Rouleau, réitère qu’elle est « sensible à l’enjeu des organismes communautaires locataires du CSSDM ».
« Je travaille avec mes collègues des autres ministères concernés pour accompagner les organismes touchés par cette situation. Nous explorons toutes les possibilités et avons tenu plusieurs rencontres fructueuses à ce jour. Nous allons poursuivre notre travail », s’est-elle limitée à dire.